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L’évaluation d’un produit de santé, selon une méthode reconnue, est un impératif

catégorique. Le recours à l’essai est donc scientifiquement indispensable,

bien qu’éthiquement délicat. L’ensemble des données obtenues au cours de

l’évaluation est agrégé dans le module V du dossier CTD. Au plan réglementaire,

le processus d’évaluation doit aboutir au précieux sésame, l’AMM (le marquage

CE dans le cas du DM) qui est aujourd’hui la finalité de la collecte d’informations

dans le développement clinique.

La question de la preuve d’efficacité est devenue centrale dans la définition

des traitements « qui marchent », utilisés et remboursés dans un contexte

général de maîtrise des coûts. Le « golden standard » dans l’efficacité est et

reste le sacrosaint essai randomisé contrôlé, bien que nous sachions aujourd’hui

que des méta-analyses d’essais randomisés contrôlés (de haute qualité) ont une

puissance statistique supérieure. L’efficacité ainsi démontrée, s’applique à un

échantillon de population, par l’étude d’une médiane ou d’une moyenne, cela

ne dit pas de l’effet réel prédictible sur un patient (qui plus est non sélectionné).

D’autre part, démontrer l’efficacité d’une thérapeutique, ne signifie pas que

celle-ci soit « utile » en termes de santé publique .

A la décharge des fabricants, il se fait que certains paramètres liés à « l’utilité

» du produit de santé sont difficiles à mesurer objectivement dans les essais et

études. Car il s’agit de mesurer la Qualité de Vie liée à la Santé (qui ne se réduit

pas à la résolution des maladies), c’est-à-dire évaluer les répercussions de la maladie

et de son traitement, perçues par le patient dans les différentes dimensions

de la vie et sur son état de bien-être physique, psychique et social. Il convient

alors de « mesurer la subjectivité en santé ».

La question actuelle n’est donc pas de critiquer l’évaluation, mais plutôt de

trouver des moyens de la réaliser afin qu’elle ait du sens au plan clinique et soit

pertinente d’un point de vue méthodologique. Cela sera aussi un moyen de réduire

l’écart qui peut se creuser entre la pratique et la recherche. Des méthodes

statistiques émergentes, comme la méthode bayésienne permettent de « scientiser

» l’intuition du chercheur (aussi médecin) en s’appuyant sur des observations

cliniques subjectives (dont les questionnaires de qualité de vie de patients).

Le développement du médicament évolue et les nouveaux types de plans

adaptatifs d’études et d’essais devraient conduire à une « Tunnelisation » de

l’évaluation du produit de santé, tout au long de sa vie, et non plus seulement

avant l’AMM. Les règlements récentes plaident en ce sens et font écho à des accidents

retentissants en répondant aux attentes des populations de patients, plus

en prise aujourd’hui qu’hier avec la stratégie de soins qui leurs sont dispensés,

avec en horizon, une préoccupation durable sociologiquement et budgétairement

parlant : « moins de soins, mieux de soins, plus de santé ».

[BARDIE Y., Essais Cliniques - Du patient à l’objet de science, Ed Sauramps Médical, disponible à la BIU]